Toute personne peignant à l’huile se doit de connaitre au minimum les bases de la chimie des matériaux qu’elle emploie. Cela permet surtout de comprendre le processus de vieillissement et les interactions des outils et matériaux qui composent l’œuvre. Des temps de siccativation ou des proportions non respectés mettent toute l’œuvre en danger. Celle-ci risque d’avoir une durée de vie relativement courte (craquelures, coulures, matité…). La règle du gras sur maigre est à connaitre, autant qu’un cuisinier connait les méthodes de cuissons relatives à ses ingrédients.
Le processus naturel
Une peinture à l’huile ne sèche pas, elle siccative. Un séchage est le résultat d’une évaporation, or avec l’huile, c’est l’inverse qui se produit puisque c’est l’oxygène de l’air qui pénètre dans la pâte picturale, provoquant son durcissement et l’augmentation de son poids et de son volume (voir le schéma ci-dessous).
C’est un phénomène naturel au processus parfois très long, pouvant aller jusqu’au siècle (lire l’article sur les temps de séchage), car plus la pâte est épaisse et dense, moins l’oxygène parvient à s’engouffrer. Les premières couches appliquées doivent durcir plus rapidement que celles qui les superposent car si ce n’est pas le cas, voici ce qui va se passer : La surface va se solidifier formant comme une barrière, l’oxygène sera alors incapable d’atteindre la pâte en profondeur qui restera par conséquent molle indéfiniment. Au moindre coup, mouvement ou tension du support, la « croûte » se craquellera, tout comme se briserait une fine couche de glace sur un lac gelé.
Pour éviter ces dommages irrémédiables, il faut simplement que la nouvelle couche soit toujours plus grasse que la précédente. Voilà le principe même de la règle du gras sur maigre.
Le gras et le maigre
Pour correctement appliquer cette règle (cliquez ici), il est indispensable de comprendre et de définir ce que sont les produits gras et maigres :
Plus un produit contient de l’huile, plus il est gras. Cependant, rajouter de l’essence en vue de l’amaigrir n’est qu’illusion, car pour qu’un produit soit maigre sa teneur en huile doit être faible, or l’essence dilue l’huile sans pour autant la supprimer. C’est la quantité d’huile qui détermine si un produit est gras ou maigre, et non la quantité d’essence. Dans un récipient, si de l’huile et de l’essence sont mélangées, au bout d’un certain temps l’essence se sera évaporée alors que la dose d’huile restera la même. C’est ce processus d’évaporation qui fait qu’une peinture devient de plus en plus grasse avec le temps.
De plus, trop diluer une peinture c’est la soumettre à de nombreux risques, car une fois les pigments dispersés, ceux-ci sont exposés à nu et subissent alors plus facilement les dommages dus au temps, à l’humidité, aux UV, etc. A l’inverse, la résine protège ces pigments en les enrobant, c’est pourquoi les dosages d’huile et de résine dans la fabrication des médiums et leurs mélanges avec les couleurs doivent être maîtrisés.
Une peinture trop grasse sera fluide, brillante, glissante au point de créer des coulures sur le support. En plus de laisser une surface fragile, cassante et jaunissante.
A contrario, une peinture trop maigre donne une surface sèche, terne et des couleurs instables. Certaines craquelures apparaissent naturellement au bout d’un certain temps, environ quelques décennies. En revanche, si elles apparaissent seulement au bout de quelques mois, il est fort probable que la règle du gras sur maigre n’ait pas été respectée.
l’art de peindre est aussi l’art de maitriser la matière
Bonjour,
Est-ce vraiment efficace de vernir une peinture a l huile car en fait, nous supprimons le séchage en étouffant ?
Bonjour, c’est pourquoi le vernis doit être appliqué 6 mois après l’achèvement de l’oeuvre afin de s’assurer du séchage complet de la pâte picturale. Le vernis est indispensable pour la peinture à l’huile, voir l’article sur le sujet ici
Bonjour Amandine,
je débute avec la peinture à l’huile. Que pensez-vous si je fais les couches suivantes ? :
1ère couche : peinture diluée à l’essence de térébenthine,
2ème couche : peinture + médium près à peindre du commerce
3ème couche : peinture + médium à glacis du commerce
Y a t-il des risque d’embus , decraquelage et quel serait d’après vous le temps de séchage entre le couches ? Merci pour vos précieux conseils.
Soizic
Merci Amandine pour votre réponse rassurante. Je suivrai votre conseil de n’utiliser qu’un seul médium pour la 2ème et la 3ème couche. Celui de la 3ème couche devant être plus gras, dois je diluer un peu ( 25-30%) le médium près à peindre de la 2ème couche et l’utiliser pur à la 3ème ou pur à la 2ème et enrichi en huile à la 3ème (25-30%). Quelle solution vous paraît la plus appropriée et présentant le moins de risque de craquelure ? Merci pour vos bons conseil. Soizic.
Le mieux est votre première solution : utiliser de moins en moins l’essence, et de plus en plus de médium. Merci à vous
Bonjour Soizic, votre procédé est très bon, cependant le médium à peindre permet aussi de réaliser des glacis, il suffit d’en augmenter la proportion en mélange avec votre couleurs, jusqu’à ce que celle-ci devienne transparente. Ce seul médium permet de faire beaucoup de choses et qui plus est, mieux vaut limiter (ou plutôt éviter) de mélanger différents médiums entre eux, car chacun a une composition chimique différente.
Quant au temps de séchage entre les couches, quelques jours sont nécessaires. Votre surface doit être dure au toucher.
Merci à vous !
Bonjour Amandine
J’ai toujours peint en ajoutant un peux d’huile de lin suivant le motif à peindre afin de rendre la peinture plus légère surtout pour des trait fin et autres, donc ma question et de savoir si le fait de mettre de l’huile de lin peux affaiblir la peinture au fil du temps ou la faire craqueler
Bonjour, l’huile apporte de l’élasticité à la pâte, le fait d’en ajouter crée une surdose puisque de l’huile est déjà présente au sein du tube de couleur. Par conséquent, il n’y aura pas de craquelures causées habituellement par le manque d’élasticité. En revanche, attention de ne modérer votre dosage, car trop d’huile peut rendre la peinture poisseuse et extrêmement longue à sécher.
Bonjour,
En tant qu’amateur, j’ai peint pour le plaisir 6 tableaux sur toile de lin préparée, mais je n’ai utilisé ni essence de térébenthine, ni huile de lin ou médiums particuliers. Je peins au couteau uniquement. La plupart du temps, ma dernière couche de peinture est la première couche puisque l’application au couteau est déjà en soi épaisse. Je n’ai pas de craquelures sauf sur un tableau où j’ai appliqué une quantité moins épaisse de peinture, mais ces craquelures m’arrangent bien sur ce tableau car elles apparaissent sur des bâtiments en ruine.
Ceci étant dit, pensez vous qu’il faut appliquer « gras sur maigre » dans ce cas précis où je n’applique au couteau qu’ seule couche épaisse ? Difficile de comprendre ce concept lorsqu’il n’existe qu’une seule grosse couche. Je vais bientôt passer au vernissage final pour les tableaux qui ont plus d’un an de séchage.
Merci beaucoup ?
Bonjour, la règle du gras sur maigre n’implique bien entendu que les superpositions de couches. Si une oeuvre n’est réalisée qu’en une seule couche, le problème ne se pose pas. Merci à vous
Bonjour,
Pourriez-vous me donner les proportions à suivre en résine et huile pour les médiums successifs dans la réalisation d’une oeuvre à la Manière des Flamands?
Bonjour, voici l’article relatif à leurs techniques : https://www.art-totale.com/peindre-comme-les-maitres-flamands/
Aujourd’hui le médium flamand (vendu en tube) est excellent, il reprend la composition et les effets procurés par la technique de ces maîtres du nord : la brillance, l’aspect émaillé, la solidité. Il s’utilise comme un médium standard, sa dilution varie selon les couches. Il est très efficace, agréable à utiliser mais son prix est assez conséquent, il faut donc prévoir un budget.
Bonjour,
est ce que cette règle du gras sur maigre existe en acrylique ?
Cordialement, Alexis
Non cette règle n’est valable que pour les techniques grasses. L’acrylique est une technique à l’eau , donc maigre, qui se plastifie en séchant. Donc rien à craindre si vous superposez les couches. Cordialement
Bonjour, qu’en est-il pour les huiles diluables à l’eau?
Merci. Cordialement,
ludovic
Bonjour Ludovic, les huiles diluables à l’eau durcissent beaucoup plus rapidement que les classiques, il est donc plus facile de superposer les couches de peintures sans risques.
Ah merci, je suis débutant en peinture et c’est ici que j’apprends !
Merci encore
Alexis
Excellent comme article, et le gros David, très bien réussi, j’ai bien ri!
Merci,
Jacques
BRAVOOOOOO, explication parfaite et simple de comprendrer