Diane Bérubé, artiste-peintre québécoise, nous montre sa manière de réaliser un portrait de manière réaliste en 5 étapes. Son processus traditionnel est remarquable et sa vidéo de qualité. Etudions là afin de bien appréhender la technique.
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1ere étape : Le dessin
Etant donné que cette étape est omise de la vidéo, il est fort probable que le dessin ait été effectué avec l’aide d’un projecteur. Cet outil permet d’avoir un dessin reproduit à l’identique et rapidement (Artograph. ) Il en existe de différentes précisions et différents prix, mais le plus courant de part son prix abordable (moins de 100€) est le Hobby Tracer d’Autographe (vidéo de démonstration).
2e étape : Le Lavis
Le lavis permet de positionner les nuances, les ombres et les lumières grâce à un “jus” formé par des couleurs diluées. Cette étape est en quelque sorte un repère pour la mise en couleur, pour le corps de la peinture. Il est important que le jeu de lumières soit effectuée avec justesse car il est d’autant plus difficile de rectifier ces erreurs par la suite.
Diane Bérubé indique qu’elle utilise du brun, du blanc et du Liquin. Le liquin est un médium pour peinture à l’huile composé de résine alkyde qui accélère le temps de durcissement, fluidifie les couleurs en les rendant plus souples, plus transparentes sans pur autant les amaigrir ; Contrairement à l’utilisation seule de l’essence (térébenthine ou White Spirit par exemple) qui fait perdre de la consistance à la couleur est donc de la qualité.
Rubens par exemple, utilisait une seule couleur pour son lavis, uniquement de la terre de Sienne brûlée. Il n’utilisait donc pas de blanc car il se servait de la couleur du fond (comme en aquarelle). Rubens diluait sa terre de sienne brûlée avec de l’huile ou du vernis copal.
Citation à ce propos dans le livre de Xavier de Langlais – La technique de la peinture à l’huile :
“Cette teinte (terre de sienne brûlée) doit être étendue d’huile et de vernis copal, afin de donner un jus transparent à travers duquel le panneau blanc apparaîtra lumineux”.
3e étape : L’ébauche
L’ébauche sert à mettre les différentes teintes en place, comme une sorte de répétition avant le spectacle. Cette étape peut être appliquée sur un lavis encore frais. L’artiste utilise ici la terre d’ombre naturelle, le blanc de titane, le liquin, le jaune de cadmium pâle, le rouge de cadmium et le bleu outremer. Le choix dans les couleurs se ressente dans l’aspect même du tableau. Si l’on se réfère aux Maîtres flamands, les couleurs utilisées pour les portraits étaient : Blanc d’argent (remplacé par le titane) / Ocre jaune ou stil de grain / Laque de Garance, vermillon ou ocre rouge / Outremer ou cobalt / Terre verte / Terre de sienne brûlée / Noir d’ivoire.
Une fois les couleurs du fond mises en place, le fond peut être estompé avec un pinceau propre, sec et doux (blaireau, putois ou même synthétique), afin que celui-ci devienne uniforme et que soient supprimées toutes les traces de poils.
4e étape : L’application des couleurs
Cette fois-ci, les couches précédentes doivent être bien dures et ce même en profondeur, c’est pourquoi mieux vaut attendre au minimum 24h. Cette étape est également appelé le “corps” de la peinture, c’est ici que la pâte picturale sera la plus épaisse et la plus déterminante pour le résultat final.
Cennino Cennini nous explique comment procéder :
“Prends trois vases, mets dans l’un, supposons du rouge pur, pour les deux autres, une des couleurs sera plus claire et la troisième, pour les demi-tons, sera faite du premier vase et de ce second clair.
Prends maintenant le premier, c’est-à-dire le plus obscur avec un pinceau un peu gros et un peu pointu, suis les plis de ta figure dans les lieux les plus obscurs et ne dépasse jamais le milieu de la grosseur de cette figure : Ensuite prends la couleur du milieu, couvre tes plis en partant du ton obscur. Alors prends la couleur la plus claire et couvre le côté de la lumière, en conservant toujours le nu sans coloris. Puis avec un autre vase de blanc pur, termine avec soin les reliefs les plus saillants.“
5e et dernière étape : Les glacis
Pour cette ultime étape, le tableau doit être dur en surface, alors attendez plusieurs jours ou peut-être même plusieurs semaines avant d’appliquer les glacis. Selon André Béguin, un glacis “est une peinture colorée, destinée à rester transparente de manière à ne pas recouvrir un fond mais à en modifier simplement la teinte.”
Dans cette vidéo l’artiste nous propose d’utiliser le Liquin, sinon, il existe dans le commerce des médiums spécialement pour glacis qui sont de très bons produits tout à fait efficaces et un peu plus adaptés car plus riches. Le glacis est utilisé pour rehausser certaines teintes afin de donner plus d’effets de profondeur, de réalisme, d’éclat et de contraste et donc créant un rendu plus beau. C’est étape est cruciale et essentielle pour sublimer votre travail à l’huile.
A présent, à vos pinceaux!
Excellent de pouvoir visionner les étapes. Débutant en peinture, je m’aperçois donc, si j’ai bien compris, qu’il s’agit de déposer les couleurs par-dessus les ombres, et non travailler l’ombre en même temps que la couleur. C’est ça non ?
Aussi, j’ai entendu que beaucoup de peintres peignaient tout d’abord entièrement leur toile, le plus souvent en gris ou rouge pour je ne sais quelle raison. Or, sur la présente vidéo, cette étape n’est pas mentionnée. Pourriez-vous m’éclairer ? Cordialement.
Bonjour, il existe plusieurs méthodes de réalisation qui diffère selon les époques et les courants artistiques. La grisaille qui consiste à ébaucher son oeuvre uniquement dans les tons gris est typique du XIVe siècle ; appliquer toutes ses ombres dans des couleurs terres en 1ère couche et venir poser les couleurs par la suite est propre au clair-obscur ; travailler les couleurs en même temps dès la 1ère couche relève est plutôt moderne. A vous de peindre comme bon vous semble, du moment que le résultat vous satisfait. Merci à vous
Bonjour Amandine,
J’ai découvert votre site qui est très bien fait je trouve et je vous remercie!! j’apprécie beaucoup la technique alla prima, mais il faut dessiner avant les grandes valeurs non?
Jesouhaite me remettre a la peinture à l’huile, et réaliser un portrait, cependant j’ai deux questions: la première, j’ai des pigments purs d’ocre, terre de sienne.. et je voudrais savoir quelles sont les quantités de térébenthine et huile de lin à ajouter pour faire un médium et les mélanger avec les pigments? la deuxième, j’ai lu sur un autre blog qu il vaut mieux commencer par les couleurs les plus sombres, mais ne vaut il pas faire le contraire? même si avec la peinture à l’huile on peut modifier ce qu on vient de faire..
Merci!! à bientôt!
Bonjour, chaque pigment nécessite une quantité de liant particulière, ils ne réagissent pas tous de la même manière. Certains vont demander un ajout d’environ 50%, d’autre seulement 30%, les quantité varient énormément. C’est donc à vous d’ajouter l’huile de lin au pigment (sur une plaque de verre par exemple) peu à peu, jusqu’à obtenir la consistance souhaitée. L’essence de térébenthine ne s’utilise qu’ensuite, une fois la peinture (mélange pigment/liant) réalisée. l’huile de lin est le liant pour les pigments, la térébenthine est le diluant pour le mélange des deux précédentes.
Quant à votre deuxième question, c’est vrai qu’on commence bien souvent par les couleurs claires car il est toujours plus facile d’assombrir lorsque l’on peint en couche fine. Mais si comme Rembrandt ou Van Gogh vous peignez en couche épaisse, en “pâte”, alors dans ce cas les lumières sont ajoutées et accentuées en dernier.
Merci à vous. Cordialement
Très intéressant votre article .
Il y a cette Citation à ce propos dans le livre de Xavier de Langlais Technique de la peinture à l’huile
” Cette teinte doit être étendue d’huile et de vernis copal, afin de donner un jus transparent à travers duquel le panneau blanc apparaîtra lumineux ”
Les huiles je m’y perd car il y en a plusieurs sur le marché ! laquelle utiliser?
Le vernis copal est-il comme le liquin fine détail ?
Merci
Merci Manon!
L’huile de lin est la plus utilisée, elle est solide, souple et siccative (c’est à dire qu’elle sèche relativement vite), mais son défaut est qu’elle jaunit. L’huile d’oeillette est plus claire donc elle ne jaunit pas, par contre elle est moins siccative. Entre les deux si on peut dire, vous trouvez l’huile de Carthame, elle est “semi-siccative”! Les 3 ont le même usage et la même utilisation,à vous de faire votre choix.
Quant au vernis copal, il donne du gras et de la brillance. Mieux vaut l’utiliser en médium à peindre (mélangé à l’huile) qu’en tant que vernis final (trop sombre, trop épais et cassant). Xavier de Langlais conseille donc de mélanger l’huile et le copal afin de réaliser des glacis. Aujourd’hui vous pouvez tout aussi bien utiliser le Liquin fine detail qui est un produit moderne, prêt-à-l’emploi offrant les mêmes caractéristiques, et en plus il n’y a pas de risque de jaunissement. :)